Eh oh! Il y a un problème! Vous m’entendez?

J’aimerais vous raconter une histoire, celle d’une soeur qui se crispait petit à petit, résistait comme elle pouvait, se défendait maladroitement et s’exprimait sans succès.

L’histoire d’une soeur comme celles de milliers d’autres.

En rentrant de l’école, elle n’avait pas envie de faire ses devoirs. Bien que sa mère tentait de la raisonner, de l’accompagner. Au souper, pas envie de partager, autant venir plus tard ou jouer sous la table. Débarrasser son assiette, pas question.

Tout était devenu compliqué avec elle.

Face à autant de résistance, ses parents durcissaient le ton. A chaque durcissement, l’attitude de la fille était encore plus défensif. Et puis, il n’y avait pas que cette mauvaise volonté. Cette grande sœur devenait mesquine avec sa petite sœur, profitant méchamment de sa naïveté et de son impuissance. Les jours passaient, les cris désespérés de la Petite traduisaient les comportements agressifs de sa sœur. Les parents intervenaient pour faire cesser cette injustice, d’une voix forte et autoritaire, parfois avec des mots durs et blessants. Les moments de rires s’étaient envolés. Les moments câlins ne résistaient pas plus longtemps que les 5 premières minutes au réveil. Les habits restaient par terre dans le passage, malgré les nombreux rappels. On aurait dit qu’elle n’entendait plus. Les échanges quotidiens se réduisaient à des phrases irritées, lancées sur le ton du défi, de la menace ou de l’impuissance, accompagnés de soupirs, de râles ou de silences agaçants. D’où venait donc toute cette mauvaise volonté et cette agressivité ? De l’école peut-être.

Trois fois, la mère prit sa fille à part et tenta de discuter.

Maladroitement. La mère arriva malgré tout à exprimer ce qui n’était pas acceptable pour elle, sans blesser sa fille davantage. Et elle permit à sa fille d’en faire autant. Trois fois, sa fille lui dit, comme ça, sans lien avec ce qui se disait : « Tu défends toujours ma sœur, elle est méchante ». La première fois, la mère n’entendit pas. Elle prit ceci pour une manière de détourner l’attention du vrai sujet. Celui du manque de respect pour tout ce que ses parents faisaient pour elle, cette résistance à tout, cette absence de coopération. Elle ne se laisserait pas détourner du sujet qui devait être résolu. La deuxième fois que la fille fit cette même remarque, quelques jours plus tard, la mère ne pu s’empêcher de défendre avec vigueur cette sœur qui était sans cesse la cible de sa mauvaise humeur et qui devait être protégée. Fin de la discussion. Plusieurs jours passèrent.

A la troisième discussion enfin, la mère entendit. Et elle se tut.

Puis elle répéta : « tu trouves que je défends toujours ta sœur. Tu sens que tu n’es pas acceptée, elle oui». Maintenant ces phrases résonnaient dans sa tête. Elle saisit. Enfin.

Et si c’était ça le fond du problème ? Et si c’était vrai que la Petite Soeur l’énervait pour la faire réagir. Ce n’était pas faux, elle savait qu’en faisant ces cris de victime elle allait attirer la foudre sur sa sœur. La mère écouta à nouveau. Elle s’assura de bien comprendre en reflétant ce qu’elle entendait : « Tu penses qu’en te poussant à bout, elle cherche à me faire venir pour que je la plaigne et la câline. Parce qu’elle sait que c’est ce qui va arriver si tu tapes et qu’elle crie. Mmmh, je vois. » Il y eu plus de silence et de connexion que de mots cette fois-ci. Puis la fille partit jouer. Avec sa sœur.

La mère prit garde. Elle voyait les choses autrement maintenant. Quand les disputes et les cris surgissaient, elle ne prenait plus parti, elle demandait à chacune de s’exprimer. Il n’y avait plus de victime à câliner et de bourreau à gronder.

Et puis tout changea.

L’assiette était débarrassée sans rappel. Les habits ne traînaient plus devant l’entrée, les câlins retrouvèrent leur place, les rires aussi. Une dynamique fluide et joyeuse retrouvait sa place. Elle avait été entendue, plus besoin de créer des signaux. Et la Petite retrouvait chaque matin sa brosse à dent avec du dentifrice dessus, préparé avec soin par sa soeur!

Trop souvent nous pensons que le problème est chez l’enfant, alors qu’il est dans la relation. Trop souvent nous ne voulons pas admettre que le problème est un signal. Un signal à écouter.

Texte par Laure Steiner Convers
Image par Pexels de Pixabay 

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